Les 5 étapes clés à travers la vie d’un partenariat technologique

Cher dirigeant,

Je vais vous parler cash. En 25 ans en tant que DSI, j’ai vu des partenariats technologiques naître, grandir, exploser ou s’épanouir. Mon plus long ? 18 ans avec le même client, jusqu’à ce que celui-ci soit racheté par Vinci.

Aujourd’hui, je veux vous faire comprendre pourquoi certains partenariats technologiques durent des décennies alors que d’autres explosent après quelques mois. Parce que franchement, si vous pensez encore que changer de prestataire tous les 2 ans c’est malin, vous vous trompez lourdement.

Tout partenariat commercial évolue selon cinq étapes que j’ai vécues des dizaines de fois. Des étapes qui se chevauchent, se télescopent, et que la plupart des dirigeants ignorent complètement. Résultat ? Ils reproduisent les mêmes erreurs, encore et encore.

1. La lune de miel : quand tout le monde ment

Soyons honnêtes : pendant la prospection, tout le monde ment. Pas méchamment, mais par omission. Vous présentez votre entreprise comme si elle était parfaitement organisée (alors que vos processus datent de Mathusalem), et lui vous vend du rêve avec des démos qui marcheront « forcément » chez vous.

J’ai vu des prestataires passer des nuits blanches pour préparer une présentation parfaite, avec des consultants qu’ils n’assigneront jamais sur votre projet. De votre côté, vous sortez le grand jeu : votre vision technologique, vos projets ambitieux, votre budget (légèrement gonflé pour impressionner).

Cette phase, c’est de la séduction pure. Vous passez des heures en réunion à fantasmer sur ce que vous allez construire ensemble. Lui vous promet la lune, vous lui promettez un partenariat au long cours. Tout le monde y croit. C’est beau, c’est magique, et c’est complètement déconnecté de la réalité.

Le problème ? Cette euphorie ne dure jamais. Et quand elle retombe, c’est là que les choses sérieuses commencent.

2. La lutte pour le pouvoir : bienvenue dans le monde réel

Ah, le réveil ! Brutal, mais nécessaire. Vous découvrez que leur « expert senior » a en fait 2 ans d’expérience, et eux découvrent que votre « système moderne » tourne encore sous Windows Server 2012.

Les petits mensonges du début deviennent des problèmes énormes. Les délais annoncés ? Multipliez par deux, minimum. Le budget ? Ajoutez 30% pour les « spécificités non identifiées lors du cadrage ». Et ne parlons pas de cette fameuse « simplicité d’intégration » qui nécessite finalement de reprendre la moitié de votre SI.

C’est la phase où chacun sort ses griffes. Vous exigez ce qu’on vous a promis, lui vous explique pourquoi c’est impossible avec votre existant. Vous menacez de résilier, il menace de partir. Bienvenue dans la vraie vie des partenariats technologiques !

Voici la vérité qui dérange : plus de la moitié des partenariats explosent à cette étape. Pourquoi ? Parce que personne n’avait prévu cette phase de réajustement. Vous pensiez que signer un contrat suffisait ? Erreur fatale.

Les chiffres sont cruels : la durée médiane d’un partenariat tech est passée de 7 ans dans les années 90 à 4 ans et demi aujourd’hui. Traduction ? Vous changez de prestataire avant même d’avoir fini de le former à vos spécificités. Malin, non ?

3. Le partage du pouvoir : apprendre à vivre ensemble

Si vous survivez à l’étape 2 (et c’est un gros « si »), vous entrez dans la phase la plus intéressante : apprendre à bosser ensemble pour de vrai.

Ici, fini le théâtre. Vous acceptez que votre prestataire ne soit pas parfait, et lui accepte que votre organisation ait ses contraintes. Vous arrêtez de rêver et vous commencez à construire.

Par exemple, vous comprenez enfin qu’il a besoin de marge pour survivre (eh oui, surprenant !), et lui comprend que vous ne pouvez pas doubler votre budget IT du jour au lendemain. Vous négociez un vrai budget, avec de vraies priorités, et de vrais arbitrages.

Les dirigeants qui réussissent cette étape ont un point commun : ils prennent 100% de la responsabilité de leur bout du partenariat. Ils ne rejettent pas tout sur le prestataire quand ça coince. Ils se regardent dans la glace et se demandent : « Qu’est-ce que j’ai mal fait ? Comment puis-je améliorer les choses ? »

Vous faites ça, vous ? Ou vous cherchez toujours le coupable chez les autres ?

4. L’engagement : enfin du sérieux

C’est ici que les choses deviennent vraiment intéressantes. Votre collaboration n’est plus basée sur les promesses du début, mais sur une connaissance réelle et mutuelle. Vous connaissez ses forces et ses faiblesses, il connaît les vôtres.

C’est le moment de formaliser un vrai partenariat stratégique. Pas un contrat de plus, mais un engagement mutuel basé sur la confiance. Vous n’êtes plus client-fournisseur, vous êtes complices.

Dans mon partenariat de 18 ans, c’est à cette étape que nous avons vraiment décollé. Nous avions traversé trois crises majeures ensemble, survécu à deux changements de direction, et nous nous connaissions par cœur. Résultat ? Une efficacité redoutable et des innovations qu’aucun de nous n’aurait pu réaliser seul.

5. Maturité ou séparation : l’heure des choix

Après des années de collaboration, deux chemins s’offrent à vous.

La maturité : Votre partenariat devient une référence. Vous témoignez ensemble dans des conférences, vous inspirez d’autres organisations. Vous rigolez même de vos anciennes crises en vous demandant comment vous avez pu être aussi naïfs.

La séparation : Parfois, malgré des années réussies, les chemins se séparent. Évolution technologique, changement stratégique, rachat (comme ce fut mon cas avec Vinci)… Ce n’est pas un échec, c’est la vie.

L’important ? Que cette séparation se fasse dans le respect mutuel, en préservant ce qui a été construit ensemble.


Mes trois règles d’or pour ne plus foirer vos partenariats

Après 25 ans à observer, analyser et parfois subir ces dynamiques, j’ai tiré trois leçons que je vais partager avec vous. Trois règles qui vont peut-être vous déranger, mais qui peuvent sauver votre prochain partenariat.

1. Vous avez besoin de lui, lui n’a pas besoin de vous

Ça fait mal, hein ? Pourtant c’est la réalité. Votre prestataire a 50 autres clients, vous n’avez qu’un prestataire principal. S’il vous perd, c’est ennuyeux. Si vous le perdez, c’est la catastrophe : migration des données, formation des équipes, perte d’historique…

Mais au lieu de subir cette réalité, utilisez-la ! Devenez le client qu’il a envie de garder. Comment ? Payez dans les délais (oui, même en période difficile), respectez ses équipes, donnez-lui des projets stimulants, écoutez ses conseils au lieu de toujours imposer vos idées.

Je vous garantis qu’un client qui fait ça devient prioritaire. Ses demandes passent avant les autres, il a les meilleurs consultants, et il accède parfois à des conditions préférentielles.

Alors, regardez-vous dans la glace : quel genre de client êtes-vous ?

2. Créez un terrain fertile (ou restez dans votre médiocrité)

Un partenariat réussi, ça se cultive. Ça ne pousse pas tout seul comme du chiendent.

Côté organisation, arrêtez de donner 15 interlocuteurs différents à votre prestataire. Désignez des contacts formés et tenez-vous-y. Documentez vos processus métier au lieu de laisser votre prestataire deviner. Préparez vos équipes au changement au lieu de les laisser saboter le projet par résistance.

Et surtout, libérez du temps ! Vos experts métier doivent être disponibles pour accompagner le prestataire. Sinon, ne venez pas pleurer si les livrables ne correspondent pas à vos attentes.

De son côté, un bon prestataire doit investir du temps pour comprendre votre métier, former vos équipes et documenter ses réalisations.

La question qui tue : combien de temps investissez-vous vraiment dans la relation avec votre prestataire ? Une heure par mois ? Une demi-journée par trimestre ? Si c’est ça, ne vous étonnez pas du résultat.

3. Des règles du jeu claires (sinon c’est le chaos)

Vous voulez un partenariat qui fonctionne ? Fixez des règles du jeu claires dès le départ. Et je ne parle pas d’un contrat de 200 pages que personne ne lit.

Des SLA négociés : Arrêtez d’imposer vos conditions unilatéralement. Asseyez-vous, négociez, trouvez un équilibre. Un SLA réaliste respecté vaut mieux qu’un SLA irréaliste constamment violé.

Une culture partagée : Vous travaillez comment, vous ? Vous préférez les mails ou les coups de fil ? Vous testez comment ? Vous livrez quand ? Alignez-vous sur ces sujets-là, pas sur la couleur de l’interface.

Une gouvernance qui tient la route : Point hebdomadaire opérationnel, revue mensuelle tactique, comité trimestriel stratégique. Et tenez-vous-y ! J’ai vu trop de partenariats mourir faute de communication régulière.


La question qui dérange

Maintenant, regardez-vous dans la glace et posez-vous ces questions :

  • Combien de prestataires avez-vous changés ces 5 dernières années ? Et pourquoi, vraiment ?
  • Quel type de client êtes-vous ? Celui qu’on a envie de garder ou celui qu’on subit ?
  • Investissez-vous vraiment dans vos partenariats ou vous contentez-vous de consommer des prestations ?
  • Vos échecs passés, c’était vraiment « de leur faute » à 100% ?

Parce que si vous continuez à penser que le problème vient toujours des autres, vous allez reproduire les mêmes erreurs. Encore et encore.

Moi, en 25 ans, j’ai appris une chose : les meilleurs partenariats naissent quand on arrête de chercher le prestataire parfait et qu’on commence par devenir le client parfait.

Alors, prêt à changer de perspective ?


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